13 sept. 2017

[Blog N°15] Un été de Charybde en Scylla avec Amazon

Ça y est : l'été est fini. Peut-être pas au niveau calendaire, mais, ici, dans le Nord, je peux vous dire que c'est bien le cas. L'automne est déjà là, tout comme la pluie. L'occasion donc de sortir ce blog de son hibernation estivale et justement de parler d'un sujet que je n'avais pas forcément abordé jusqu'à présent : mes mésaventures. Plus précisément mes mésaventures de cet été. Parce que, quand on est un auteur indé, rien n'est jamais réellement simple.
Il est toujours amusant de voir comment le temps, l'usage et l'expérience, peuvent faire évoluer nos opinions. En janvier dernier, je vous expliquais, avec bon nombre d'arguments, pourquoi j'avais décidé – et cela tient toujours malgré ce billet – d'offrir l'exclusivité numérique de mes romans à Amazon. Et pourtant, aujourd'hui, je vous raconte l'enfer qu'Amazon m'a fait vivre cet été.
Petite mise en garde, néanmoins. Ce blog n'a pas pour but de lancer une vendetta - après tout mes interlocuteurs ont toujours été cordiaux et, je le pense maintenant, ont fait de leur mieux – mais seulement de mettre en lumière certaines pratiques/logiques qui m'exaspèrent.

Quand le système perd la tête

Beaucoup d'entre vous le savent certainement, mais rien ne me prédestinait à tenter cette aventure d'auteur indé et certainement par mon cursus universitaire. Si aviez raconté ce qui m'attendait à mon moi d'il y a quelques années, il vous aurait certainement dit, plus ou moins subtilement, que vous racontiez des bêtises, quand bien même cette idée de devenir un auteur indé aurait allumé une petite flamme quelque part en lui. Ainsi, dans le cadre de ma césure, j'ai notamment eu l'occasion de faire un stage dans une très grande entreprise, pour n'en retenir finalement que cet univers – inutilement complexe, figé, normalisé, hiérarchisé et organisé autour de règles aberrantes – n'était pas pour moi. Or, c'est justement à cet aspect d'Amazon que je me suis frotté... Charybde m'aspirait dans les profondeurs d'un système qui aura eu raison de toute ma détermination.
Il y a peu, je vous ai fait part de mon envie de vendre moi-même mes romans sur Amazon et donc de ne plus recourir à l'impression à la demande proposée par le groupe. Ce faisant, les avantages étaient doubles : je pouvais vous proposer une version que je juge plus qualitative de mes romans, tout en augmentant ma part des bénéfices. Bref, tout le monde y était gagnant.
Alors, sitôt le nouveau tirage de Les Décharnés et de Creuse la Mort reçu, je crée un compte vendeur et un certain nombre d'exemplaires des deux ouvrages part pour les locaux d'Amazon avec en vue leur mise à disposition sur leur plate-forme. Jusqu'ici tout marche comme sur des roulettes : Amazon a bien reçu mes produits, les a enregistrés et est prêt à les vendre en mon nom puis à les expédier pour moi. Puis commencent les galères, l'eau s'agite et tourbillonne.
Premier constat : mon offre, alors qu'elle est la seule pour cette version du roman, est reléguée au second plan et s'avère donc presque introuvable. Pourquoi ? Tout simplement parce que le système – qui a bon dos, croyez-moi – met automatiquement en avant l'offre « vendue par Amazon », pourtant sans stock. Moi, je ne suis qu'un vendeur tiers... Je ne fais donc pas le poids. Mais, je ne démords pas et, suite à des dizaines de mails et des heures au téléphone (je ne plaisante pas), je parviens à leur faire entendre raison et à leur faire voir que garder une offre en rupture de stock permanente ne répond à aucune logique commerciale. Ils finissent alors par supprimer l'offre vendue par Amazon. Je suis aux anges : ma détermination a réussi à « battre » ces logiques stupides qui m'avaient dégoûté de ces grands groupes figés. Pourtant, non, je n'en avais pas fini avec le « système » ; déjà mes pieds étaient emportés vers le fond.
Car, à présent, quand bien même mon offre est la seule à proposer du neuf, la seule issue de l'éditeur/auteur et la seule pour la version 2017 des romans, je me retrouve en concurrence avec d'autres vendeurs tiers dont les offres – parfois de l'occasion de vieilles versions vendues à 40€ – sont mises en avant dans les résultats de recherche.
Des mails et, encore et toujours, des appels plus tard, on me propose enfin une solution : souscrire à un compte professionnel, moyennant un abonnement de près de 45€ par mois et attendre (3 mois!) que le système évalue mon offre et la juge comme étant la plus intéressante. Alors, elle sera mise en avant directement sur la page du produit. Malgré la teneur du message « Paie, attends et tu verras bien », je dis bingo !. C'est pourtant bien là que j'aurais peut-être dû lâcher le morceau, mais ce n'est pas mon genre.
Alors, avec la promesse que l'abonnement me sera remboursé si les ventes ne suivent pas (elles ne peuvent de toute façon pas suivre puisque mon offre est toujours difficilement accessible), je capitule et je souscris à un compte professionnel. Puis, c'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase : les offres d'autres vendeurs, sans qu'ils n'aient eu à attendre, ne sont plus uniquement mises en avant dans les résultats de recherche, elles le sont également sur la page produit, jetant définitivement mes offres aux oubliettes... À quoi bon tous ces efforts et ce temps perdu ? Je craque et je réactive la mise en vente des versions imprimées à la demande pour que celles-ci reprennent le pas sur les offres concurrentes, et je me désabonne du compte professionnel... Charybde m'avait complètement avalé.
{ Ici, je me permets une petite parenthèse, car rien de cela ne se serait produit si, dès le départ, mes produits avaient été vendus directement par Amazon et avais donc souscrit à leur programme « Avantages » pour devenir leur fournisseur officiel et pas seulement un vendeur tiers. Leur offre aurait été mise en avant et tout aurait été pour le mieux dans le meilleur des mondes... mais cela aurait été sans compter sur les 50% de remise demandés, les frais de port à la charge de l'éditeur etc... autant de frais qui rendent l'opération financièrement impossible. Notez d'ailleurs que le programme auquel j'avais souscris (« expédié par Amazon » et pas « vendu par Amazon » donc) a vu ses frais considérablement augmenter le 1er août (comme par hasard) et que, ce qui n'est indiqué nul part, tous les frais sont exprimés HT et soumis à la TVA (ajoutez donc un petit 20% en guise de petite surprise à tous les frais retenus par Amazon déjà fort élevés...). Fin de la parenthèse. }
Néanmoins, aujourd'hui, tout n'est pas sombre puisque je pense avoir trouvé un compromis acceptable en continuant à proposer les romans imprimés à la demande (ce qui garantie ma visibilité), tout en proposant les versions 2017 des romans sur la même page produit. Il vous faudra juste chercher un petit peu pour les trouver. Est-ce pour autant ce que j'envisageais au départ ? Non, mais faute de grives... vous connaissez la suite. En un mot : je préférais encore garder ma santé mentale.


Quand le sort s'acharne

Malgré tout ça, Amazon n'avait pas fini d'essayer de me rendre dingue. Car, alors que je me battais pour que les versions papiers de mes romans soient visibles, c'est la version numérique de Les Décharnés qui a été victime, de longues semaines durant, d'un bug rendant le titre tout simplement inaccessible. Ma frêle embarcation fonçait à présent tout droit sur les rochers acérés de Scylla.
Comme vous le savez, Amazon fonctionne comme un cercle vertueux et ce n'est pas pour rien que je vous demande si souvent de partager votre avis sur mes romans là-bas. Pourtant, les commentaires, s'ils peuvent aider un lecteur potentiel à se décider à acheter (ou non) un roman, n'influencent pas réellement sur la visibilité d'un titre. Alors oui, si vous recherchiez Les Décharnés, le roman apparaissait toujours en premier, mais quid des « tops », des classements sur lesquels des milliers d'utilisateurs se basent pour faire leurs achats ? Les Décharnés avait disparu.
En effet, ce bug (qui est entièrement du fait d'Amazon, je tiens à le souligner) ne m'a pas seulement privé de près de 2 mois de ventes de mon « best-seller », il a condamné Les Décharnés à l'oubli. Avant ce bug, le roman était un habitué, presque un pensionnaire, du top 20 dans la catégorie Horreur ce qui lui assurait des ventes constantes et tout à fait satisfaisantes. Mais, après une si longue période d’inaccessibilité, où est-il à présent ? Perdu dans les tréfonds des classements, assuré de ne plus pouvoir piquer la curiosité d'aucun lecteur potentiel... Mon Scylla à moi, c'est ce rocher immense sur lequel des mois et des mois de travail pour rendre ce roman visible se sont échoués sans que je ne puisse rien y faire, si ce n'est compter sur l'incompétence des équipes techniques d'Amazon pour réparer ce bug... et ils ont traîné...
Aujourd'hui, alors que le roman est – a priori – à nouveau disponible (bien que je ne sois pas certain que les rares ventes enregistrées depuis aient réellement été comptabilisées, ni pour les classements, ni pour ma rémunération...), c'est donc un nouveau combat que je mène contre Amazon en cherchant à leur faire entendre leur tort. Cela est en bonne voie, je pense, et ils devraient me donner un coup de pouce pour rendre sa visibilité à Les Décharnés. Sinon, et c'est déjà beaucoup, il ne me restera que votre soutien pour rebondir. Mais il paraît que j'ai une bonne détente.
Bref, pour terminer ce long blog, je tiens juste à souligner que mon but était aucunement de vous apitoyer, ni de pleurnicher – tous les boulots ont leur lot de merdes – mais simplement d'illustrer ce à quoi un auteur indé peut être confronté et de continuer à partager mon expérience – soit-elle bonne ou mauvaise – avec vous. Une chose est certaine : même si ces mésaventures ne changeront pour le moment rien à la manière dont mes romans sont distribués, Amazon vient de perdre une partie de la confiance que je leur accordais et ils auront bien du mal à la retrouver.

Partager

3 commentaires

IsaD
J'ai suivi ta "saga" estivale, quelle galère pour un auteur indé...
Je t'applaudis sincèrement pour ton courage et ton parcours, pour ton choix d'avoir suivi tes envies (pour notre plus grand plaisir de lecteur!) et non un parcours tout tracé mais qui ne te correspondait pas.
J'espère qu'Amazon te remettra sur les rails, parce qu'il te le doit après cet enfer administratif sans pitié.
13 sept. 2017 at 13h27 • Répondre
Paul Clément
Un grand merci Isabelle pour ton soutien. La saga continue ;)
15 sept. 2017 at 13h55 • Répondre
helene
Ils ont dû quand meme faire le job. Amazon au travers de la kindle m'a proposé ce roman. Et au vu des critiques j'ai chargé l'extrait qui m'a aspiré vers la suite. Je ne regrette absolument pas. J'ai adore alors que je n aime pas trop les histoires de zombie. Suis tombée dans le panneau... bravo
5 mars 2018 at 3h06 • Répondre
Écrire un commentaire

Cookies et données personnelles.

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies pour vous proposer des contenus et services adaptés à vos centres d'intérêts.
OK